Cet article est repris du blog de Paul Da Silva. Il réuni 2 articles portant sur IPFuck.
Tout le mérite lui revient.
IPFuck : alors comme ça l’adresse IP est une donnée sure ?
Depuis qu’internet existe le legislateur n’a eu de cesse de vouloir le contrôler. Parfois en essayant d’en contrôler le contenu, souvent en essayant d’en contrôler les acteurs. Pour ce faire il se basait souvent sur une donnée réputée sûre : l’adresse IP.
Mais les choses ont évolué et les technologies avec et, aujourd’hui, cette donnée n’est plus une donnée sûre !
Pourtant les lois qui continuent à être votées, Hadopi en tête, se basent toutes sur un relevé de ces fameuses adresses.
Depuis des mois (peut-être même plus d’un an) je ne laisse mon adresse IP presque nul part à l’aide d’une extension firefox que je vous avais déjà présenté ici : Modify Headers. Mais cette solution ne me suffisait plus et au vu des événements récents j’ai commencé à me poser des questions sur une généralisation et une simplification de cette méthode que j’utilisai jusqu’alors.
Puis l’actualité a été défrayée par un certain SeedFuck, logiciel de torrent poisoning dont je vous ai rapidement parlé sur mon dernier billet à propos d’Hadopi.
C’est ça ! Il faut que je combine les deux outils pour arriver à une solution très simple à l’utilisation et qui finisse d’achever l’adresse IP qui, encore aujourd’hui, fait accuser des innocents…
C’est ainsi qu’est né IPFuck (nommé d’après SeedFuck donc), le premier logiciel d’HTTP poisoning. Le principe est sensiblement le même qu’avec SeedFuck : il s’agit d’envoyer, en plus de sa vraie adresse IP que l’on ne peut pas masquer sans que les paquets ne se perdent, trois adresses générées aléatoirement, selon des règles que vous choisissez dans les options, ou parmi une liste d’adresses que vous choisissez.
Le serveur qui reçoit la requête l’interprète et renvoie la réponse au bon endroit. La navigation se passe donc exactement comme si vous n’aviez pas installé l’addon pour vous. Mais le site sur lequel vous vous êtes connecté a enregistré (potentiellement, tout dépend du code utilisé) 4 connexions différentes, dont trois sont effectuées avec une adresse qui ne vous appartient pas.
Et pour télécharger ce tout petit plugin qui devrait (enfin) finir de persuader quelques bien pensants que l’adresse IP n’est plus une preuve, c’est ici que ça se passe : IPFuck !
Quelques précisions sur l’utilisation et les limites d’IPFuck.
Dimanche soir je lançais IPFuck, une extension firefox d’HTTP poisoning. Le concept étant assez technique et surtout très abstrait je m’attendais à ce que certains aient du mal à en saisir l’intérêt voire que d’autres comprennent complètement de travers le but de cette extension. J’ai donc surveillé (autant que possible) ce qui s’est dit un peu partout sur la toile et il s’avère que j’avais raison d’avoir peur…
Je me dois donc de revenir ici sur le fonctionnement et le principe d’IPFuck en répondant aux interrogations que j’ai le plus souvent relevé. J’en oublie sûrement, mais ces points là sont fondamentaux et doivent être traités maintenant (si bien que j’ai sauté ma pause repas et suis en train de bouffer un sandwich devant l’admin de WordPress pour ça ^^).
C’est dégueulasse, ça va faire accuser des innocents
Oui, mais non : effectivement si la justice s’entête à considérer l’adresse IP comme une information nominative il va y avoir un certain nombre de faux positifs. Mais ce que je fais là, de façon automatisée, est faisable depuis des années avec un niveau en informatique très relatif. J’ai juste accéléré le process en l’automatisant , les faux positifs existent depuis que l’IP existe et sont une vraie plaie compte tenu du caractère sacro-saint donné à l’IP par la justice.
C’est justement pour faire sauter cette idée selon laquelle l’IP est une information sûre que j’ai créé IPFuck… Pour que la justice prenne conscience du fait que l’IP est un indice et non une preuve !
Je peux pas télécharger deux fichiers à la fois sur Rapidshare
Sans déconner ? Une plateforme qui gagne des millions en louant de la BP à des ados en manque de p0rn a mis en place des systèmes de sécurité un peu plus évolués que ceux que l’on peut contourner avec une extension firefox de 13ko ? Zut alors !
Plus sérieusement : ce n’est pas le but d’IPFuck que de vous faire économiser 17€ tous les trimestres… Et oui un certain nombre de sites et services se basent encore sur l’adresse IP telle que transmise par la couche de transport du réseau. La bonne nouvelle c’est que la protection de ces sites là peut être bypassée par l’utilisation d’un vrai proxy qui n’en n’aura que faire des adresses IP envoyées sur la couche application du réseau et qui pourtant (jusqu’à IPFuck et à part dans de très rares cas jusque là) contient la réelle adresse IP du visiteur.
IPFuck nous met à l’abri d’Hadopi
Faux, faux, faux et archi faux ! Personne n’est à l’abri d’Hadopi ! que vous téléchargiez ou non ! La encore c’est ce que j’essaye de prouver avec IPFuck et ce qui a déjà été prouvé avec SeedFuck que je ne trouvais pas assez « grand-public » pour que le message passe bien.
La quantité de faux positifs (là encore) va être phénoménale et les relevés d’IP truffés d’adresses dont les propriétaires ne savent même pas ce qu’est le P2P.
Pour revenir sur IPFuck : il agit uniquement sur les flux HTTP qui passent par firefox. Rappelons qu’Hadopi ne surveillera (dans un premier temps) que le P2P… Alors à moins que l’on me présente un logiciel de P2P qui passe en HTTP via Firefox je ne vois pas comment IPFuck pourrait nous sauver d’Hadopi.
IPFuck envoie 3 paquets supplémentaires
Techniquement faisable, concept intéressant même… Mais non ce n’est pas ce qui se passe ^^ Ce qu’IPFuck fait c’est qu’il ajoute aux paquets envoyés 3 adresses IP dans des entêtes habituellement réservées à contenir l’adresse IP réelle de quelqu’un qui utilise un proxy.
Le service web que l’on consulte va donc détecter que l’on est derrière un proxy et essayer de savoir qui est réellement derrière ce proxy en allant lire les fausses IP qu’IPFuck a ajouté aux paquets.
IPFuck rend anonyme
Toujours pas (en même temps c’est le principe de cet article) : l’utilisation massive d’IPFuck combinée à la présence déjà massive d’utilisateurs de proxy va rendre très difficile la distinction entre une personne effectivement derrière un proxy et un utilisateur d’IPFuck. Et donc leur identification. Mais il y a toujours, en examinant au cas par cas, moyen de retracer quelqu’un qu’il utilise un proxy ou IPFuck.
Cette vérification systématique n’est que très rarement effectuée et cela est regrettable : Hadopi notamment se base sur un relevé des IP (par une société privée *sic*) qui seront ensuite transmises aux FAI pour identification… Si l’adresse en question a été usurpée c’est quand même le réel propriétaire de l’adresse qui va être inquiété…
Mais alors ça sert à rien
C’est encore l’aberration la moins aberrante que j’ai lu à propos d’IPFuck. Techniquement cela n’impacte en rien votre connexion.
Pour le service web que vous visitez (site internet, application, …) par contre cela rend très difficile l’identification rapide. Après enquête il sera assez vite déterminé que votre IP réelle n’est pas un proxy et vous pourrez donc être inquiété si vous avez utilisé IPFuck, persuadé d’être anonyme, pour commettre un cyberdélit quelconque…
Par contre vous pouvez utiliser IPFuck, en le réglant sur une plage d’IP américaine par exemple, pour visionner du contenu réservé aux résidents des Etats-Unis…
Petit test pour le fun : paramétrez IPFuck pour choisir une IP qui commence par 68 et allez sur le site officiel de South Park voir les épisodes (« Full episodes »). Désactivez IPFuck et rafraichissez la page ?
Un autre test ? : laissez la plage IP entre 0.0.0.0 et 255.255.255.255 et allez sur ce site : http://geotool.flagfox.net/ A chaque rafraîchissement vous êtes citoyen d’un nouveau pays !
Ce qu’il faut en retenir
Encore une fois le message à faire passer ici tient en une phrase, et il s’adresse (ça en fait des adresses en un article) directement à tout ceux qui basent des lois sur des relevés d’IP : ne faites pas confiance à une adresse IP !